[COMMUNIQUÉ DE PRESSE] Menaces sur le droit d’asile des personnes LGBTI+

Association pour la défense des droits des personnes LGBTQI+ à l'immigration et au séjour

[COMMUNIQUÉ DE PRESSE] Menaces sur le droit d’asile des personnes LGBTI+

L’ARDHIS s’alarme d’un recul sans précédent du droit d’asile LGBTI, du fait d’une évolution néfaste de la jurisprudence à l’œuvre depuis quelques mois.

Depuis les années 1990, les instances de l’asile en France et en Europe considèrent que les personnes LGBTI constituent un groupe social et peuvent donc obtenir le statut de réfugiées *. Ce motif est désormais explicite dans les directives européennes et la loi française.

Pendant des années, en France, la jurisprudence s’est affinée jusqu’à établir que tout·e demandeur·se d’asile LGBTI peut obtenir le statut de réfugié·e dès lors qu’il·elle est originaire d’un pays où les personnes LGBTI sont persécutées (en termes juridiques, qu’elles y constituent un groupe social). Cette interprétation découle du fait qu’on ne peut exiger qu’une personne LGBTI renonce à son orientation sexuelle ou son expression de genre, ni qu’elle les dissimule pour éviter les persécutions. 

Or, en septembre 2019, la Cour nationale du droit d’asile (CNDA) a rejeté la demande d’asile d’une femme lesbienne de la République démocratique du Congo (RDC) en motivant sa décision de façon très inquiétante. En effet, si la CNDA a bien établi l’orientation sexuelle de la requérante, reconnaissant par ailleurs que les personnes LGBTI constituent un groupe social en RDC en raison des persécutions qu’elles y subissent, la Cour a jugé que cette personne avait vécu sans difficulté au Congo pendant des années et qu’il y n’avait de fait pas lieu de lui octroyer une protection.

Cette décision a été contestée auprès du Conseil d’État, mais dans sa décision du 30 mars 2021, le Conseil d’État a donné raison à la CNDA, brisant un consensus qu’il avait lui-même instauré. 

L’ARDHIS constate que la Cour nationale du droit d’asile applique d’ores et déjà ce raisonnement à des personnes issues de pays où les relations homosexuelles sont pourtant gravement pénalisées, comme l’Algérie (où les personnes homosexuelles s’exposent à 3 ans de prison et à une amende de 500 à 10 000 dinars) et le Sénégal (où les personnes homosexuelles sont exposées à un à cinq ans de prison). 

Faut-il attendre que les personnes LGBTI aient été victimes du pire dans leur pays d’origine pour espérer être protégées par la France ? 

Les personnes LGBTI déboutées du droit d’asile seront-elles renvoyées vers des pays où la Cour elle-même considère que les personnes LGBTI y sont persécutées ? 

Jusqu’où cette négation du droit d’asile pour les personnes LGBTI ira-t-elle ? 

En ce 17 mai 2021, Journée internationale contre les LGBTIphobies, l’ARDHIS s’alarme de cette évolution et craint le pire pour les personnes LGBTI exilées espérant obtenir la protection de la France. 

CONTACT PRESSE : Aude Le Moullec-Rieu – 07 86 30 11 51

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* Lorsque la convention de Genève relative au statut de réfugié·e a été ratifiée en 1951, elle n’évoquait pas le cas des personnes lesbiennes, gaies, bisexuelles, trans ou intersexuées. En revanche, elle prévoyait que certaines personnes pourraient être protégées au titre de leur appartenance à un groupe social.